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La procédure devant la CNS pour les acteurs du monde de l’art

Article publié le 24 janvier 2024

La Commission nationale des sanctions constitue l’institution compétente pour les divers acteurs du monde de l’art qui à la suite d’un contrôle seraient en irrégularité dans la mise en place des obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Une seule et même institution a, depuis l’ordonnance du 12 février 2020, un pouvoir de sanction à l’encontre de l’ensemble des acteurs du marché de l’art (maisons de vente, galeries, antiquaires, brocanteurs, marchands) qui n’auraient pas respecté leurs obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT).
La saisine de la Commission nationale des sanctions s’opère, en ce qui concerne les acteurs du marché de l’art, par la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI). Une telle saisine, pouvant donner lieu à une sanction finale à l’encontre du professionnel du marché de l’art, répond à une procédure spécifique précisée par le Code monétaire et financier afin d’assurer le respect des droits de la défense du professionnel. Le non-respect d’une des dispositions du Code monétaire et financier en la matière peut donner lieu à une contestation ultérieure de la décision et, dans certaines hypothèses, à l’impossibilité de poursuivre le professionnel concerné pour les faits à l’origine de la procédure.  

La phase préalable à l’audience
La notification de griefs est adressée par le secrétaire général de la Commission nationale des sanctions à la personne mise en cause. Celle-ci est alors invitée à adresser des observations écrites. La notification de griefs permet de lancer la procédure et d’informer les personnes concernées des griefs pour lesquelles elles peuvent être sanctionnées, conformément à l’article L. 561-41 du Code monétaire et financier.
Une fois cette notification réalisée, un rapporteur indépendant est désigné par le président de la Commission nationale des sanctions au sein de ses membres. Ce rapporteur étudie le dossier et rédige un rapport visant à présenter son analyse à la Commission nationale des sanctions. Les orientations proposées dans le rapport ne lient pas la Commission nationale des sanctions.
La composition de la Commission nationale des sanctions est communiquée à la personne mise en cause, qui peut demander la récusation de l’un de ses membres, s’il existe une raison sérieuse de douter de l’impartialité de celui-ci, conformément aux principes directeurs en matière de respect des droits de la défense. À cet égard, toute demande de récusation éventuelle est adressée au secrétariat général, par la personne mise en cause ou son mandataire, dans un délai de huit jours à compter de la découverte du motif de récusation. La demande doit, à peine d’irrecevabilité, viser nominativement le membre concerné de la Commission nationale des sanctions, indiquer avec précision les motifs de la récusation et être accompagnée des pièces propres à la justifier. La Commission nationale des sanctions se prononce sur la demande de récusation par une décision non motivée. La décision prise par la Commission nationale des sanctions sur la demande de récusation ne peut être contestée devant une juridiction qu’avec la décision de sanction elle-même. 

L’audience et la décision de la Commission nationale des sanctions
La personne mise en cause peut demander que l’audience soit publique. Cependant, le président de la Commission nationale des sanctions peut interdire au public l’accès de la salle pendant tout ou partie de la séance afin de préserver l’ordre public ou lorsque la publicité est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ou à tout autre secret protégé par la loi.
Le déroulé de l’audience répond au principe de l’alternance, avec en premier lieu la présentation orale par le rapporteur préalablement désigné de son rapport, ce dernier reprenant les griefs pour lesquels le professionnel du marché de l’art est renvoyé devant la Commission nationale des sanctions. Puis, la ou les personnes mises en cause sont invitées à présenter leurs propres observations en défense de leurs droits. La Commission nationale des sanctions procède à l’examen des différents griefs. Enfin, les personnes mises en cause ont la parole en dernier.
La Commission nationale des sanctions ne peut délibérer que si trois au moins de ses membres, titulaires ou suppléants, sont présents et doit statuer par décision motivée, hors la présence du rapporteur de l’affaire et à la majorité des membres présents. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante. Un procès-verbal de la séance doit être établi par le secrétaire de séance, désigné par le président. Le procès-verbal est signé par le président et les membres de la Commission nationale des sanctions, ainsi que par le secrétaire de séance.
Enfin, la décision en tant que telle, dûment signée par le président et les membres de la Commission nationale des sanctions, doit être notifiée à la personne concernée, par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception, conformément à l’article R. 561-50 du Code monétaire et financier. 

Les sanctions pouvant être prononcées par la Commission nationale des sanctions
L’article L. 561-40 du Code monétaire et financier précise que la Commission nationale des sanctions peut prononcer l’une des sanctions suivantes : 1), l’avertissement, 2) le blâme, 3) l’interdiction temporaire d’exercice de l’activité ou d’exercice de responsabilités dirigeantes au sein d’une personne morale exerçant cette activité pour une durée n’excédant pas cinq ans, ainsi que 4) le retrait d’agrément ou de la carte professionnelle.
La sanction de l’interdiction temporaire d’exercice peut être assortie du sursis. Si, dans le délai de cinq ans à compter du prononcé de la sanction, la personne sanctionnée commet une infraction ou une faute entraînant le prononcé d'une nouvelle sanction, celle-ci entraîne, sauf décision motivée, l’exécution de la première sanction sans confusion possible avec la seconde.
La Commission nationale des sanctions peut prononcer, soit à la place, soit en sus de ces sanctions, une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à cinq millions d’euros ou, lorsque l’avantage retiré du manquement peut être déterminé, au double de ce dernier. Les sommes sont alors recouvrées par le Trésor public.
La Commission nationale des sanctions peut décider que les sanctions qu’elle inflige feront l’objet d’une publication aux frais de la personne sanctionnée dans les journaux ou publications qu’elle désigne. Elle peut aussi décider de mettre à la charge de la personne sanctionnée tout ou partie des frais occasionnés par les mesures de contrôle ayant permis la constatation des faits sanctionnés.

À ce titre, les 20 et 26 octobre 2023, la Commission nationale des sanctions a rendu ses premières décisions contre des professionnels du marché de l’art n’ayant pas remplis leurs obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT). Si ces décisions ont fait l’objet de publications aux frais des professionnels dans des journaux du monde de l’art, leur publication sur le site de la Commission reste attendue. Dans la première affaire, la CNS a prononcé à l’encontre d’une galerie et de son gérant une interdiction temporaire d’exercer l’activité de commerce d’œuvres d’art pour une durée de six mois avec sursis, une telle interdiction devenant alors automatique en cas de nouvelle infraction dans les cinq années suivant la sanction. Au-delà de cette première sanction, une sanction pécuniaire de 10.000 euros a été retenue contre la société et de 5.000 euros à l’encontre de son gérant. Dans la seconde affaire, la CNS a également prononcé à l’encontre d’une galerie et de son gérant une interdiction temporaire d’exercer l’activité de commerce d’œuvres d’art pour une durée de six mois avec sursis, sanction assortie ici d’une sanction pécuniaire de 30.00 euros contre la société et de 5.000 euros à l’encontre d’un gérant et de 3.000 euros à l’encontre d’un autre gérant. 

Les voies de recours
Les recours formés contre les décisions de la Commission nationale des sanctions sont des recours de pleine juridiction.

Un article écrit par Me Alexis Fournol
Avocat Associé 

Dans le cadre de son activité dédiée au droit de l’art et au droit du marché de l’art, le Cabinet assiste régulièrement les professionnels du secteur (commissaires-priseurs et galeristes notamment) ainsi que leurs syndicats dans la mise en conformité de leur activité au regard des contraintes attachées à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Notre Cabinet intervient aussi bien en France qu’en Belgique, notamment à Bruxelles.